Face à la menace russe et au désengagement américain, l’Allemagne fait le pari du « quoi qu’il en coûte » pour se réarmer

« Whatever it takes » : le futur chancelier Friedrich Merz répète régulièrement cette formule anglaise, équivalente au « quoi qu’il en coûte » d’Emmanuel Macron pendant la crise du Covid. Et c’est la seule règle qui compte pour lui. Le Bundestag a modifié sa Constitution pour assouplir la règle du frein à l’endettement : cela va permettre de dépenser presque sans compter pour la défense, qui a été négligée pendant des années. L’objectif est d’atteindre 100 milliards d’euros par an de dépenses, soit deux fois plus qu’aujourd’hui.

Le projet a été surnommé « Le bazooka », cela dit l’ampleur de la réforme. Ces investissements sont nécessaires, selon le conservateur Friedrich Merz, pour faire face à un éventuel désengagement militaire américain. 60% des Allemands soutiennent la réforme. Selon la commissaire à la Défense du Parlement, l’armée allemande manque de tout : il faut des chars, des blindés, des munitions… Car beaucoup de matériel a été donné à l’Ukraine (l’Allemagne est le deuxième soutien financier et militaire de Kiev, après les Etats-Unis). Il y a deux ans, le chancelier Olaf Scholz avait promis de faire de la Bundeswehr l’armée la plus puissante de l’Union européenne. On en est encore loin : les soldats vivent parfois dans des casernes délabrées, les besoins d’investissements sont importants dans les hautes technologies, les drones, les satellites et la défense aérienne.

Cette enveloppe va aussi permettre à l’Allemagne de tenir les nouveaux objectifs de l’Otan, qui seront communiqués début juin. Pour l’instant, l’Alliance demande à ses membres de consacrer 2% de leur PIB aux dépenses militaires. Le nouveau secrétaire général, Mark Rutte, propose de porter ce seuil autour de 3,5%, ce qui coûterait à l’Allemagne plusieurs dizaines de milliards d’euros supplémentaires.

Pour pallier le manque d’hommes, le retour du service militaire ?

La Bundeswehr manque de personnel : 181 000 soldats actifs selon le dernier recensement, il en faudrait au moins 20 000 de plus. L’idée a resurgi d’un retour du service militaire obligatoire, aboli en 2011 : pour le lieutenant-colonel Marcel Bohnert, vice-président de l’association de la Bundeswehr, c’est une nécessité, pour faciliter le recrutement.

« On est sur les réseaux sociaux, on fait de la publicité partout dans les écoles, mais cela ne suffit pas, argumente-t-il. Faute de personnel, beaucoup de soldats doivent accomplir deux, voire trois fois plus de tâches. La Russie est en train de renforcer son économie de guerre et d’armer 1,5 million de soldats. Si nous ne faisons rien, nous serons vulnérables. »

Mais la commissaire à la Défense s’oppose au retour du service militaire obligatoire. Faute de casernes, d’équipements et d’instructeurs en nombre suffisant, elle estime que la Bundeswehr n’a pas les moyens d’accueillir un grand nombre de recrues.

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